La filière volaille consomme de plus en plus d’eau : la production européenne de viande de volaille et d’œufs est en constante augmentation et les besoins en eau par surface de production croît également. Effectivement :
- Des évolutions réglementaires et commerciales dans le cadre de la prévention de certaines maladies animales (Salmonella, Influenza aviaire, par exemple) nous imposent une obligation de résultats en termes de lavage (absence de poussières et de matières organiques) et de désinfection en vide sanitaire.
- Afin de répondre au concept One Health, des améliorations techniques, en l’occurrence hygiéniques, participent à la réduction de l’usage des antibiotiques en élevage de volailles.
- La conception des bâtiments ayant évolué, notamment en bétonnant les sols, le lavage entraîne une consommation accrue en eau.
Bien que le lavage et la désinfection ne représentent que 6% de l’usage total en eau[1], il nous semble important d’imaginer des pistes d’économie d’eau en vide sanitaire.
L’utilisation d’eau de surface pour le nettoyage des bâtiments est autorisée si elle est préalablement assainie par un traitement assurant l’inactivation d’agents pathogènes des oiseaux. De plus en plus d’exploitations s’équipent soit de cuves de récupération enterrées, soit de poches à eau.
L’usage d’un détergent, bien plus que le trempage, semble être la piste d’économie la plus facile à mettre en œuvre, que ce soit dans des bâtiments avec un sol en terre battue ou bétonné. Malgré un temps dédié à l’application du détergent (estimé à 20 minutes pour 1000 m² de surface déployée), le gain de temps de lavage et donc d’économie d’eau se situe entre 30 et 50% en fonction des études (Synthèse Elevage et Chambre d’agriculture Gest’olav[2]). Un effet positif supplémentaire de l’utilisation d’un détergent est l’amélioration de la qualité de lavage donc de la désinfection ultérieure.
Le modèle du laveur haute pression influence peu la quantité d’eau utilisée : si le débit de la machine est faible, son efficacité sera moindre ce qui va augmenter le temps de lavage. Finalement, la consommation d’eau sera identique. Les laveurs à eau chaude améliorent le confort des utilisateurs en zone froide, mais aucune donnée disponible ne démontre une économie d’eau.
Des matériaux lisses, de plus en plus utilisés dans les bâtiments modernes, nécessitent moins d’eau de lavage, mais aussi de désinfection si toutefois la solution est appliquée avec du matériel adapté type lance ou canon à mousse, limitant le ruissèlement, donc la perte de produit efficace.
Vers d’autres méthodes de désinfection ? Les règles classiques de désinfection des guides de bonnes pratiques exigent jusqu’à aujourd’hui une première désinfection exclusivement de contact, c’est-à dire en pulvérisation. Mais les méthodes d’analyse actuelles permettent d’évaluer une efficacité virucide en application aérienne (thermonébulisation, fumigation, etc), ce qui permettrait de défendre une triple homologation (bactéricide-virucide-fongicide) avec ce type d’usage. Peut-on penser que les recommandations puissent évoluer, avec à terme une économie d’eau supplémentaire ? Différentes innovations technologiques issues de l’hygiène alimentaire ou du milieu hospitalier pourraient être alors étudiées en les adaptant à l’élevage. On peut parler par exemple d’aérosols de peroxyde d’hydrogène, d’injection de gaz ionisé produisant des molécules oxydantes à partir de l’air ou même de projection de vapeur d’eau, surchauffée à forte pression.
Enfin peut-on imaginer se passer de lavage, tout en répondant à la réglementation Biosécurité ? En théorie, non, car la présence de poussières et de matières organiques à la mise en place du nouveau lot d’animaux n’est pas autorisée[3]. En pratique, oui, car des systèmes de montée en température de bâtiment pour décontamination concernant des maladies réglementées ont déjà été acceptées par la DGAL et la DDPP de différents départements français. Il s’agit de monter la température du bâtiment entre 40 et 60°C sur 5 jours. Ce processus nécessite un temps de préparation important (dépoussiérage, grattage et isolation du bâtiment) et des matériaux résistants à cette montée en température. Une application de désinfectant est faite malgré tout. Cette technique est plutôt intéressante sur des élevages de poules pondeuses, où l’équipement est complexe et long à nettoyer et où l’humidité engendrée va le détériorer de manière très importante. Le coût de l’intervention effectué par l’entreprise THERMOKILL a été estimé en 2022/2023 à 50 centimes de la poule. Mais l’économie d’eau est totale, car non utilisée ! Un effet secondaire positif non négligeable pour un éleveur de poules pondeuses est la disparition des populations de poux rouges, nuisibles entraînant des pertes économiques et une nuisance du bien-être de l’éleveur et des animaux.
Conclusion
L’usage d’un détergent avant lavage est la piste d’économie d’eau la plus facile à mettre en œuvre et la moins onéreuse, disponible aujourd’hui. La récupération des eaux de surface nécessite des investissements, mais est à envisager. Des pistes de travail pour l’avenir, en termes de méthode et de conception se dessinent au travers de cet article : l’absence totale de lavage avec un chauffage de la salle, une désinfection aérienne aussi efficace que la pulvérisation et l’étude du type de surface qui pourrait faciliter le lavage et la désinfection.

Poche de récupération des eaux pluviales



Usage de vapeur sèche saturée en usine agro-alimentaire


Article rédigé par Anouk Dronneau, DMV Chêne Vert

Diplômée de l'Université de Liège en 1998, Anouk Dronneau exerce depuis 2012 au sein de Chêne Vert, sur le site de Moréac (56).
Auparavant, elle a occupé des postes en clientèle mixte puis en tant qu'adjointe de direction à la CPLB (Coopérative des Producteurs de Lapins du Bocage)
Anouk Dronneau est spécialisée en production avicole et cunicole.