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Romain Banse

mercredi 6 septembre 2023

Pass Porc n°20 : lutte chimique, naturelle ou biologique, prenez les mesures qui feront mouche

Temps de lecture : ~3 minutes

tuyau mouches

Avec des fientes accumulées servant de garde-manger inaccessible des porcs, les élevages de porc sont propices à des infestations de mouches dès le printemps et la période à risque se prolonge jusque fin octobre.
Différentes nuisances impactent durablement les élevages tant sur le plan sanitaire que sur des éléments du quotidien comme la luminosité, le nervosisme ou le dérangement du voisinage.
Une véritable gestion est nécessaire pour aboutir à une maitrise de ces espèces parmi lesquelles on retrouve la Musca domestica mais aussi le ver à queue ou encore les Psychodidae.
Cette gestion repose, comme chez beaucoup d’espèces envahissantes, sur une lutte préventive et sur une lutte curative.

Anticiper plutôt que subir 

Au cours de sa vie, une mouche (Musca domestica) vit en moyenne un mois et demi, en suivant un cycle biologique qui se déroule en 4 périodes, plus ou moins longues et actives : 1 jour pour l’éclosion de la larve, 7 jours de vie larvaire intense en 3 étapes L1, L2, L3 (l’asticot), 6 jours d’immobilité pour se transformer (la pupe) et 30 jours d’adulte volant, sachant qu’une mouche peut pondre 5 à 10 fois, à raison de 50 à 150 œufs à chaque fois. (Cycle valable à 25°C).

larve sol

La durée de ce cycle diminue avec la température et l’humidité. En saison chaude, à l’optimum de température, une génération peut émerger en 7 à 10 jours ; une mouche peut alors engendrer plusieurs millions de descendants en 4 générations. C’est ce phénomène que l’on retrouve souvent en juillet dans nos élevages.

Les premières infestations surviennent de plus en plus précocement dès le printemps, sous l’effet du réchauffement climatique. En 2022, la température moyenne du mois de mars a été de 14,5°C, contre 13,7°C en 2021 et 13,3°C en 2020. Dans beaucoup de bâtiments, il n’y plus vraiment de saisonnalité observée.

Une première vague de mouches en préfigurant d’autres, il est déconseillé d’attendre de constater la nuisance pour mettre en place la lutte. Plusieurs indices permettent d’évaluer le niveau d’infestation : présence de larves dans les zones humides et dans les déjections, adultes volant dans l’ambiance, mouches capturées par les outils de surveillance (seaux attractifs, rubans englués, etc.).

Lutte chimique, naturelle ou biologique

Trois approches de lutte raisonnée sont envisageables : la méthode « historique » avec l’application d’insecticides larvicide et adulticide issus de synthèse chimique, l’emploi de produits naturels ou dérivés de solutions naturelles et les agents de contrôle biologique. Ce sont des insectes auxiliaires naturellement parasites ou prédateurs des larves, et qui ne présentent pas de danger pour la biodiversité.

Les trois solutions répondent différemment à la demande de maîtrise. En traitement curatif, les produits chimiques sont plus performants que les produits alternatifs. Ceux -ci sont plutôt utilisés en préventif, avec une action sur le moyen et le long terme. L’avantage indéniable des produits de synthèse restent leur effet choc rapidement visible au court terme, y compris en phase aigüe d’infestation.

Etablir un protocole de lutte est donc indispensable, en identifiant les zones qui abritent chacun des stades de la mouche et en appliquant avec soin les préconisations (dosage, ciblage larve et/ou adulte, fréquence de passage). Il est possible de mixer les méthodes pour optimiser la lutte et accroitre les chances de réussite, mais la chronologie d’application est importante. 

Evolution vers des pratiques « plus vertes » qui restent économiques

Avec la démarche globale de transition écologique, l’utilisation des insecticides de synthèse est de plus en plus remise en cause. Maitriser la gestion des espèces envahissantes et plus spécifiquement des mouches, c’est aussi maitriser les différentes méthodes de lutte et pouvoir raisonner la lutte intégrée. Les éleveurs doivent se préparer à introduire des solutions alternatives aux techniques et produits chimiques conventionnels. Le principal frein est souvent le coût de traitement, la fameuse prime à la conversion. Les protocoles préventifs sont trop souvent absents alors qu’ils agissent en amont de l’infestation et visent à l’empêcher. Ce sont des démarches avantageuses techniquement pour ne pas se faire déborder par les mouches mais aussi des démarches économes. Tandis que les protocoles curatifs s’utilisent en infestation pour résoudre la problématique. Plusieurs indices permettent de mesurer le niveau d’infestation. De plus, on réduit la sélection de mouches de plus en plus résistantes aux solutions existantes. Dans le même temps, l’arsenal chimique historique se réduit d’année en année compte tenu de sa toxicité et / ou de son écotoxicité. Mais au-delà de l’application, il manque enfin un suivi précis et rigoureux de son infestation et des méthodes employées. Des méthodes de contrôles ou de piégeage peuvent être mises en place pour prévoir plus facilement les périodes de traitement. 

Article rédigé par Romain Banse, Chef de produit espèces envahissantes Synthèse Elevage.

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De formation ingénieur agronome, Romain a acquis une expérience dans la lutte contre les rongeurs et les insectes en élevage et en ville.
Il a rejoint Synthèse Elevage en 2022 et accompagne ses clients dans la gestion des espèces envahissantes.